Réforme énergétique: une alliance d’entreprises veut faire pression sur Québec

MONTRÉAL — Une nouvelle alliance regroupant six organisations du milieu économique au Québec voit le jour dans l’espoir de faire reculer le gouvernement caquiste sur l’augmentation des tarifs d’électricité pouvant découler de la forme actuelle de sa réforme énergétique.

À l’approche de l’étude détaillée du projet de loi 69, l’Alliance pour la compétitivité énergétique du Québec (ACEQ) veut «sonn(er) l’alarme sur les conséquences d’une hausse importante des tarifs d’électricité» pour les industries.

«Actuellement, les calculs sur les dix prochaines années, jusqu’en 2035, on parle d’une augmentation prévue de 60 % de la facture d’électricité. (…) À terme, ce n’est pas tenable. Il faut trouver un équilibre», évoque en entrevue le président de l’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité et porte-parole de l’ACEQ, Jocelyn B. Allard.

Son organisation fait partie de la nouvelle alliance avec le Conseil du patronat du Québec, Manufacturiers et Exportateurs du Québec, l’Association de l’aluminium du Canada, le Conseil de l’industrie forestière du Québec et l’Association canadienne de l’industrie de la chimie.

L’énergie peut représenter de 20 à plus de 60 % des coûts d’exploitation ou de production des entreprises, selon l’ACEQ, qui dit regrouper des organisations représentant des centaines de milliers de travailleurs dans différents secteurs d’activité.

Avec les changements proposés dans le projet de loi, elle craint que le Québec perde son avantage économique en matière de coût de l’énergie et mine ainsi la survie de ses entreprises.

D’après M. Allard, cet avantage compétitif sur l’électricité pour les compagnies québécoises «s’est érodé de façon importante» depuis plusieurs années. Les tarifs pour les industries ont bondi dans la province, allant à contre-courant d’autres marchés, comme les États-Unis, où les prix connaissent plutôt une tendance à la baisse, en raison des énergies renouvelables et du gaz naturel qui coûtent de moins en moins cher, mentionne-t-il.

De nouvelles augmentations de la facture d’électricité pourraient mettre en péril la survie et le développement de plusieurs usines, s’inquiète aussi M. Allard.

«La raison d’être de plusieurs de ces grandes entreprises dans les régions du Québec, c’était justement l’électricité à prix compétitif qui était abondante. Aujourd’hui, on s’aperçoit qu’on va à contre-courant de ce qui se fait ailleurs chez nos compétiteurs. On fragilise à toutes fins pratiques l’économie des régions du Québec. C’est une taxe sur l’emploi, sur les régions», affirme-t-il.

Un «profit raisonnable» pour Hydro-Québec

Le projet de loi 69 est piloté par Christine Fréchette, nommée ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie à la suite du départ de Pierre Fitzgibbon. La pièce législative vise à modifier l’encadrement du secteur énergétique, notamment afin de répondre à la hausse de la demande exigée pour l’important défi de la décarbonation de l’économie.

Hydro-Québec prévoit des investissements de 155 à 185 milliards $ afin de doubler sa production.

Si les organisations de l’ACEQ reconnaissent que la transition énergétique peut mettre de la pression sur les tarifs d’électricité, elles souhaitent tout de même que ceux-ci soient prévisibles, transparents et s’appuient sur les coûts réels assumés par la société d’État.

«Ce qu’on demande, ce n’est pas des faveurs. Ce qu’on demande, c’est d’avoir une tarification en fonction du coût réel que ça représente pour desservir les différentes classes de clients, avec un profit raisonnable pour Hydro-Québec. Et cela doit être déterminé de façon transparente devant un régulateur indépendant, comme la Régie de l’énergie», soutient M. Allard.

Aucune date n’a encore été annoncée quant à l’étude détaillée du projet de loi.