Plan contre la pauvreté: du «patchage» plutôt que d’affronter le problème à la source

MONTRÉAL — Le plan d’action gouvernemental 2024-2029 du Québec contre la pauvreté prévoit une somme de 750 millions $ sur cinq ans — une somme qui aurait dû être dirigée vers l’amélioration du revenu des personnes touchées plutôt que dans «du patchage», dénonce le Collectif pour un Québec sans pauvreté.

Ce plan de la ministre responsable de la Solidarité sociale et de l’Action communautaire, Chantal Rouleau, attendu depuis des mois dans le milieu communautaire et social, a été déposé vendredi dernier et est pratiquement passé sous le radar.

Le plan 2024-2029 annonce la reconduction de plusieurs mesures existantes ou déjà annoncées, parfois avec des fonds supplémentaires, touchant le logement abordable, par exemple, l’itinérance ou le soutien aux banques alimentaires.

«Si on compare au précédent plan d’action, il y a à peu près quatre fois moins d’argent qui a été investi comme argent neuf, donc c’est nettement insuffisant», a déploré en entrevue Serge Petitclerc, porte-parole du Collectif.

Pour ce qui est de l’aide sociale, le plan mentionne que d’ici 2029, Québec souhaite offrir un accompagnement personnalisé à 50 000 prestataires vers une démarche d’intégration en emploi ou une autre forme de «participation sociale».

«Il y a eu d’importants progrès ces dernières décennies. Seuls 4,9 % de la population adulte du Québec est prestataire au régime d’assistance sociale aujourd’hui, tandis que ce pourcentage était à 12 % dans les années 1990. Le Québec doit poursuivre ses efforts toutefois, et ce plan favorisera la participation pleine et entière des personnes vulnérables à la société», a souligné la ministre Rouleau, mardi, dans une déclaration écrite.

Le plan prévoit aussi des investissements en matière de sécurité alimentaire. «Je désire augmenter de 30 % le nombre de projets en matière de sécurité alimentaire, en particulier ceux ayant un caractère structurant et favorisant des solutions pérennes et éviter que nous soyons dans l’urgence constante», a fait savoir la ministre Rouleau.

Et les revenus?

Mais pour le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le plan de lutte contre la pauvreté ne s’attaque pas aux racines du problème: les revenus insuffisants.

Il faudrait rendre plus généreux le crédit d’impôt pour solidarité, hausser le salaire minimum et accroître le revenu des aînés et des prestataires de l’aide sociale, a plaidé M. Petitclerc.

«Vraiment des mesures qui améliorent le revenu des personnes, il n’y en a pour ainsi dire pas. Et c’est le coeur de la lutte contre la pauvreté», s’exclame M. Petitclerc.

Le plan précise pourtant que le Québec est la province où le taux de faible revenu est le plus bas au Canada, soit 6,6 %, comparativement à 10,9 % en Ontario et 10,9 % au Nouveau-Brunswick, par exemple.

On y mentionne aussi que les demandeurs d’asile «représentent 30 % des prestations du Programme d’aide sociale» et que cela «exerce une pression importante sur la capacité à offrir les services publics requis».

«Nous avons introduit formellement un caractère évolutif au plan d’action, et ce, pour la première fois depuis l’adoption de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale, il y a plus de 20 ans. Les facteurs influençant la pauvreté et l’exclusion sociale peuvent évoluer rapidement; on l’a bien vu ces dernières années avec la pandémie, l’arrivée massive de demandeurs d’asile, et la poussée inflationniste. Nous voulons être plus agiles dans nos interventions et être en mesure de réagir de façon adéquate», a ajouté la ministre Rouleau mardi.

Le Collectif pour un Québec sans pauvreté regroupe 36 organisations populaires, communautaires, religieuses, féministes, étudiantes, syndicales, coopératives et régionales.